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Emmanuelle et Gus*

Dernière mise à jour : 20 mars

Emmanuelle déclare avoir été victime de violences commises par Gus*, entre 2015 et 2020. Elle détaille la construction de cette relation et ses effets sur elle. Depuis, elle a entamé des démarches juridiques, dont certaines sont encore en cours. 


Emmanuelle est mère de quatre filles. En 2015, cela fait 17 ans qu'elle est en couple avec celui qui est aujourd'hui son ex-mari, Jean-Louis. Ils ont tenté de lancer un projet

de chantier naval ensemble qui n'a pas abouti. « J'étais très fatiguée et très déçue, je me sentais très seule et pourtant très entourée », raconte Emmanuelle. En réalité, elle était déjà dans un état de dépression, qu'elle n'avait pas détecté auparavant. « J'ai eu besoin qu'on s'occupe de moi, et dans ma vie est arrivé Gus », poursuit-elle.  



Quand nous rencontrons Emmanuelle, nous faisons face à une femme qui n'a qu'une envie : faire entendre son témoignage. ©Loris Jecko
Quand nous rencontrons Emmanuelle, nous faisons face à une femme qui n'a qu'une envie : faire entendre son témoignage. ©Loris Jecko

En mars 2015, Emmanuelle suit une page Facebook en lien avec la voile. « J'ai connu Gus sur les réseaux sociaux, on avait des points communs, on était abonné aux mêmes comptes. Il a commencé à commenter mes posts et on a sympathisé », explique la quinquagénaire. Au départ, tout se passe pour le mieux, elle est sur « son petit nuage »

et vit cette aventure « comme une adolescente ». Se trouvant dans un état de santé mentale fragile, elle raconte qu'il répondait à ses besoins du moment. 


Après des échanges à distance via les réseaux sociaux, Gus se rend chez Emmanuelle

en juin 2015. Si elle n'est pas complètement charmée au départ, elle avoue passer du bon temps à ses côtés. « Il s'imposait beaucoup à moi, c'était lui qui choisissait le rythme de nos rencontres et pas moi », précise la plaignante.  


Durant l'été, Emmanuelle devait se rendre en Italie avec son mari, mais elle y renonce au dernier moment et passe juste chez eux pour déposer les passeports de ses filles. Contacté par nos soins, il confirme ces dires et rappelle que lui et ses filles ont tenté

de mettre en garde Emmanuelle sur la manipulation dont elle était victime.

Cette dernière prenait en charge toutes les dépenses liées à ses activités avec Gus,

selon elle et son ex-mari. « Quand il l'a connue, Emmanuelle roulait en Porsche Macan, elle n'avait aucun souci d'argent et elle payait tout. Elle était sous une emprise totale,

et il lui a apporté ce qu'elle n'avait peut-être plus dans notre couple qui connaissait différents soucis, comme tout couple qui évolue », explique-t-il.  


En septembre 2015, Emmanuelle aurait été témoin de scènes et de comportements effrayants de la part de Gus. Elle déclare subir une « emprise impressionnante et latente », un processus « doux et à la fois très violent ». Après une coupure de quelques jours entre eux, elle retourne auprès de lui. Une décision qu'elle justifie par la réception de messages insistants de Gus. Selon Emmanuelle, c'est à ce moment que débute

la soumission chimique.


Pendant un an, ils se voient de façon irrégulière et communiquent via les réseaux sociaux. Emmanuelle reprend sa vie en main et gère un divorce complexe avec

son actuel ex-mari, Jean-Louis. « Le divorce, c'était très compliqué, je souhaitais une procédure simple, mais ce n'était pas le cas, et je me suis aperçu que quelque chose n'allait pas quand Emmanuelle est définitivement partie », raconte-t-il. Selon elle, Gus lui faisait croire que le méchant de l'histoire était Jean-Louis, raison pour laquelle elle devait l'éviter à tout prix. Il maintient que Gus a manipulé son ex-femme et lui faisait croire qu'il était un violeur. « Je l'ai beaucoup mise en garde, je me suis aperçu très, très vite qu'elle était manipulée. Il lui vendait des châteaux en Espagne, et ne lui proposait

que ça, mais elle m'a incendiée dès que je la mettais face à cette réalité, elle était complètement sous emprise », explique-t-il.  « Elle était dans un déni total, j'étais devenu l'ennemi à abattre, elle m'a même confié plus tard qu'il l'avait emmenée à la gendarmerie pour qu'elle m'accuse de viol ». Une fois devant les gendarmes, Emmanuelle revient en arrière car elle comprend l'absurdité de la situation.  




Si le récit d'Emmanuelle est très complexe, elle ne cesse d'y ajouter des détails et des preuves pour attester de sa bonne foi ©Loris Jecko
Si le récit d'Emmanuelle est très complexe, elle ne cesse d'y ajouter des détails et des preuves pour attester de sa bonne foi ©Loris Jecko

La Martinique 


En juin 2016, Gus projette de partir en Martinique avec Emmanuelle. Nous avons pu vérifier par nos recherches en open source que Gus se trouvait bien là-bas durant cette période, et ce, jusqu'en 2017. En effet, il était inscrit dans un club de voile sur l'île, et y a travaillé durant la période indiquée à la fois par Emmanuelle par les CV de Gus.

Il s’y rend avant elle pour des raisons professionnelles. Emmanuelle vend ses biens

et prépare son départ. Elle se dit déconnectée de la réalité, de sa famille et surtout

de ses filles au profit de Gus. Àce moment-là, elle se rend compte « qu’il a certainement raison » : « Je les ai accompagnées longtemps et c'est un ras-le-bol général. Je déconnecte, je dis oui, oui, je vais partir, mais c'est pour que je puisse vivre ma vie. Et lui il a mis en exergue le rôle de la femme, avoir droit à une vie amoureuse avant d'être maman ».

Elle part le 4 août 2016, après des démarches de déménagement laborieuses qu’elle effectue seule : « C'est hyper violent en fait, parce que vous n’avez pas le temps de

réagir ». Elle n’a d’ailleurs plus aucun contact avec sa famille et ressent « une cassure ».


Dès son arrivée, Emmanuelle reste seule pendant que Gus va travailler. Ce qui

la « sauve », durant ces onze mois en Martinique. « Il n'est pas là, je fais ce que je veux dans la journée et mes journées sont super chargées parce que je fais plein de choses », raconte-t-elle. D’après Emmanuelle, alors qu’ils recevaient les amis de Gus, il l’aurait battue en cachette : « Là, c'est à huis clos. Une baffe. Je te bouscule sur le lit. Quand

tu seras calmée, tu redescends tout de suite. J'étais très humiliée et je n'ai même pas dit ce qui s'était passé quand je suis redescendue ». Emmanuelle ressent des douleurs inexpliquées et des « nausées, des maux de ventre et des angoisses ». Elle s’interroge alors sur son état de santé et passe même des examens pour voir si elle n’a pas un cancer. Elle se sent dépérir et rédige son testament, par crainte de mourir subitement. 


Début décembre, Emmanuelle tente de se suicider. Elle était déjà affaiblie par des maladies tropicales : « Avant, je suis tombée très malade, j'ai été hospitalisée pour

le chikungunya, la dengue et le Zika. J'ai eu les trois en même temps. J'étais dézinguée, très fatiguée et avec du recul, je pense que j'étais beaucoup plus sujette à choper n'importe quoi. J'étais complètement déstabilisée, détruite, pas sûre de moi. Vers 10 h, là, j'avale un verre de rhum, je prends deux gorgées et je prends huit cachets de Lexomil, des gros cachets sécables ovales blancs. Il dira que j'ai pris du Xanax ». Pour preuve, elle nous a fourni l'attestation de l'hôpital qui l'a accueillie, faisant état de sa prise en charge et des déclarations de Gus à ce moment-là. Les documents concordent avec ses dires.



Emmanuelle dit n'avoir été que l'ombre d'elle-même pendant ces cinq années. Pour elle la tentative de suicide n'était qu'un appel à l'aide. ©Loris Jecko
Emmanuelle dit n'avoir été que l'ombre d'elle-même pendant ces cinq années. Pour elle la tentative de suicide n'était qu'un appel à l'aide. ©Loris Jecko


Pendant ce temps, Gus continue à emprunter très souvent le téléphone et le véhicule d’Emmanuelle. Quand il se déplace avec sa voiture, elle voit en lui quelqu’un de « prétentieux, riche et flambeur » : « C'est quand même ma bagnole, mais j'ai l'impression que c'est la sienne ». Quelques mois plus tard, à la fin de l’été 2017, Gus doit quitter la Martinique pour travailler en métropole. Faits confirmés une nouvelle fois par son CV. Emmanuelle se retrouve à nouveau seule. Ses amis tentent de la dissuader de repartir, sans succès.


Durant le mois d'août, Emmanuelle s’occupe de tout pour le retour et reçoit de l’aide de ses amis qui la logent. Selon elle, ils lui recommandent de quitter Gus. Emmanuelle

a des suspicions de traçage de son téléphone. Elle rentre le 4 septembre en métropole.

Gus vient la chercher à l’aéroport et lui offre un téléphone piraté, via iCloud. Grâce à

ce dispositif, il a accès à l’intégralité du contenu de son portable. Dès lors, il peut lire

ses messages et la traquer en temps réel. Dans les paramètres du smartphone, on remarque que tous les comptes de Gus sont préenregistrés ainsi que tous ses mots de passe. C'est également son e-mail qui est indiqué en tant que « mail de récupération » en cas d'oubli du mot de passe du compte d'Emmanuelle. Lorsqu'elle se rend sur certains sites, c'est automatiquement le mail de Gus qui est proposé. 



Emmanuelle tient à préciser tous les aspects de sa relation avec Gus. ©Loris Jecko
Emmanuelle tient à préciser tous les aspects de sa relation avec Gus. ©Loris Jecko

« Son jeu, ça ne marchait plus.  »


Pendant trois ans, Gus et Emmanuelle ne vivent pas ensemble. Gus vient la voir quand il peut et elle le trouve « très demandeur » : « Je suis à sa disposition mais je refuse en fait, et j'en ai marre. Et il vient quand il peut pour se faire entretenir, loger, nourrir, blanchir, la totale ». Selon elle, il en profite pour lui demander de l’argent. Le montant total estimé serait de 86 100 €, comme en témoigne l'avocat d'Emmanuelle. 


A partir de septembre 2020, Emmanuelle prend ses distances avec Gus. Elle s’entoure de ses proches pour être hors d’atteinte. Selon Emmanuelle, il aurait contacté tout son entourage en constatant cet éloignement. « Je lui ai demandé de me laisser tranquille.

Il finira par revenir chez moi en octobre et début novembre 2020. Il était déjà avec sa nouvelle conquête », rapporte la quinquagénaire. Elle se rend compte, avec l'aide de sa fille, que Gus a piraté son téléphone et la géolocalise en analysant ses comptes Google. La plaignante parvient difficilement à le mettre dehors et à le sortir de sa vie. Il l’aurait même « séquestrée ». « Il sort de ses gonds, il est transformé. C'est un diable, ce n'est plus l'ange du tout. Il me plaque au sol, il met ses genoux sur mes avant-bras, j'ai hyper mal, il m'écrase de tout son poids. Et là, il donne un coup dans ma main pour que le portable tombe et il essaye de le récupérer. Àun moment, il remet son pied dessus pour le casser. Là, je me dis qu'il est en train de casser les preuves », décrit-elle. Emmanuelle ne revoit pas Gus jusqu’au mois d’août 2021 mais elle lui écrit régulièrement pour réclamer son argent.


« Je pense que c'est un grand pervers narcissique. Je me dis qu'il a montré à plusieurs reprises que c'est un obsédé sexuel, Emmanuelle m'a raconté des choses, j'ai vu des choses, j'ai tout raconté dans un rapport », explique Jean-Louis. Ce document nous a été fourni, il fait partie des preuves invoquées par Emmanuelle dans ses différents dépôts de plaintes. 


En mars 2021, Emmanuelle dépose une première plainte contre Gus pour abus de confiance en vue de récupérer l’argent qu’il lui devrait. Aucune enquête n’est lancée, classement sans suite et pas d’appel possible. En juillet de la même année, une précédente victime de Gus obtient sa condamnation pour enrichissement sans fondement. En août, Emmanuelle vient récupérer ses affaires : « Lorsque nous sommes dans ce box de garde de meubles, il m'insulte, il se jette sur moi, il se rue sur moi et il me tabasse, il me passe à tabac. Même moi je n'en revenais pas. J'étais tétanisée ».

C’est son dernier contact avec lui. Elle se rend chez son médecin pour constater

les dégâts. Emmanuelle va porter plainte pour violence ayant entraîné une incapacité de travail n’excédant pas huit jours.



Emmanuelle a été condamnée pour diffamation envers Gus, décision qu'elle qualifie d'humiliante alors qu'elle assure ne dire que la vérité. ©Loris Jecko
Emmanuelle a été condamnée pour diffamation envers Gus, décision qu'elle qualifie d'humiliante alors qu'elle assure ne dire que la vérité. ©Loris Jecko

Réclamer justice


Après avoir mené son enquête, contacté des laboratoires et vu des médecins, Emmanuelle est persuadée d’avoir été victime de soumission chimique de la part de Gus. Elle a échangé de nombreux mails avec des laboratoires, qu'elle nous a fournis. Emmanuelle a aussi contacté toutes les femmes qui ont eu un lien avec Gus, notamment son ex-femme et sa meilleure amie. La première aurait expliqué à Emmanuelle avoir été violée et abusée pendant toute sa relation avec Gus. En discutant, elles se seraient rendu compte de symptômes communs, notamment

au niveau de la perte de mémoire et des douleurs inexplicables. Contactée par nos soins, elle n'a pas souhaité témoigner. La meilleure amie de Gus, Charlotte*, a quant à elle déclaré le connaître depuis près de 30 ans, puisqu'ils étaient camarades d'études

dans leur jeunesse. Elle est amie avec Emmanuelle depuis quatre ans et la soutient dans

ses démarches, confirmant sa version des faits. En décembre 2022, Emmanuelle porte plainte pour viol sous soumission chimique. L’avocate qui la défend à cette époque était également l’avocate de l'ex-femme de Gus, qui avait gagné contre lui pour enrichissement sans fondement. Elle a confirmé qu'elle avait travaillé avec elle dans cette affaire et qu'elle avait été dessaisie du dossier par la suite, comme nous l'a expliqué la victime présumée. 


En mars 2023, Emmanuelle comprend que ses plaintes sont toutes classées sans suite

et qu’aucun remboursement de la part de Gus n’est en cours. « Je vous confirme que

les plaintes pénales déposées par Madame *** ont toutes été classées sans suite », précise l'avocat de Gus. Emmanuelle souhaite alerter sur son cas et contacte plusieurs journalistes afin de faire entendre sa voix. Le 23 avril, un article de presse est

publié : Emmanuelle y raconte toute son histoire à visage découvert. Dans la foulée,

Gus entame des procédures contre elle pour les propos qu'elle a tenus à son encontre

de façon publique. « Lors de cette interview, Madame *** accusait Monsieur *** de la commission d’infractions extrêmement graves, d’escroquerie, mais également de viol », écrit l'avocat de Gus. 


Décidée à relancer la justice, elle porte plainte le 27 novembre 2023 pour abus de confiance (relatif au vol de ses meubles).


Le 12 mars 2024, Emmanuelle est reconnue « coupable des faits de diffamation » envers Gus « au moyen de communication au public par voie électronique », en raison de l'article publié en ligne oùelle citait ouvertement l'identité de Gus. Une décision poursuivie en appel qui la juge également coupable, comme le précise le jugement

en correctionnel. La justice a retenu à son encontre les multiples commentaires sur

les réseaux sociaux qu'elle a publiés et les messages qu'elle avait envoyés aux proches de Gus, dont découle une deuxième condamnation pour « harcèlement ». Selon elle,

son objectif était de les alerter sur les manipulations de Gus et d'éviter qu'il ne fasse d'autres victimes. Elle est « condamnée à payer la somme de 1 700 euros » à Gus,

à laquelle s'ajoutent 127 euros de coûts de procédure, 800 euros pour « réparation du préjudice moral » et 3 000 euros d'amende. Au total, elle doit débourser 5 627 euros d’indemnités et de frais de justice. « La peine prononcée avec exécution provisoire est de 8 mois d'emprisonnement, assortie du sursis probatoire, comportant notamment des obligations de soins et l'interdiction d'entrer en contact avec les parties civiles directement ou indirectement », ajoute l'avocat de Gus. Une décision « injuste »

pour Emmanuelle. « C'est une peine supplémentaire le fait de parler. En fait, nous

nous retrouvons accusées et c'est nous qui nous coltinons toutes les étapes de soins

et qui devons rendre des comptes. Actuellement, vu les condamnations que j'ai, les sommes et les paiements juridiques, ma reconstruction est en suspens », regrette-t-elle.


Emmanuelle veut se pourvoir en cassation, mais ses proches, dont son ex-mari,

la dissuadent de le faire. Aujourd’hui, elle dit préférer aller en prison plutôt que de payer. Si « la condamnée commet une nouvelle infraction, elle pourra faire l'objet

d'une condamnation qui sera susceptible d'entraîner l'exécution de la première peine sans confusion avec la seconde et elle encourra les peines de la récidive dans les termes

des articles 132-9 et 132-10 du code pénal », décrit le jugement. Au vu de l'ampleur

des documents et des recherches qu'elle a déjà rassemblées sur son propre cas, avec l'aide de son ex-mari et de personnes tierces, elle souhaite que la justice reconnaisse son statut de victime à ce sujet. 


La procédure en cours au civil devant le Juge des Affaires Familiales concerne les sommes dues entre Emmanuelle et Gus, suite à la plainte déposée en 2023 pour abus de confiance. A l’heure actuelle, le procès est reporté à une date encore inconnue des parties concernées. 


*nom modifié

Claire Thery et Loris Jecko

©Loris Jecko




 
 
 

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